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clarification de la notion de bénéficiaire effectif

08/06/2018 08:18:57

catégorie : RCS

Le bénéficiaire effectif à déclarer au RCS est identifié selon des critères de détention (capital ou droits de vote) ou de contrôle. A défaut d’identification possible selon ces critères, il faut déclarer le représentant légal de l’entité déclarante comme

Depuis le 1er août 2017, les sociétés non cotées et d’autres entités juridiques sont tenues de déposer au greffe du tribunal, pour être annexé au Registre du commerce et des sociétés (RCS), un document identifiant leur(s) bénéficiaire(s) effectif(s) (C. mon. fin., art. L. 561-46, créé par Ord. n° 2016-1635, 1er déc. 2016) (BAG 104, « Les nouveautés de la loi Sapin 2 qui intéressent la profession des greffiers », p. 1).

Le bénéficiaire effectif est défini comme la personne physique qui contrôle directement ou indirectement l’entité ou pour le compte de qui une opération est exécutée ou une activité exercée (C. mon. fin., art. L. 561-2-2).

Les modalités de dépôt et le contenu du document à transmettre au greffe ont été fixés par le décret du 12 juin 2017, qui, en revanche, n’a pas précisé la notion de bénéficiaire effectif, qui restait particulièrement floue et donc source d’incertitudes pour les déclarants (D. n° 2017-1094, 12 juin 2017 : JO, 14 juin) (BAG 110, « Obligation d’information des sociétés non cotées sur leur bénéficiaire effectif », p. 4).

Le décret n° 2018-284 du 18 avril 2018, renforçant le dispositif français de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme, dissipe ces incertitudes en précisant cette notion pour les différentes entités concernées, qu’il s’agisse de sociétés (C. mon. fin., art. R. 561-1), de placements collectifs (C. mon. fin., art. R. 561-2) ou d’autres formes d’entité (C. mon. fin., art. R. 561-3 ; D. n° 2018-284, 18 avr. 2018, art. 5 à 8, 71 et 79 : JO, 20 avr.). Les dispositions de ce décret relatives à la notion de bénéficiaire effectif sont entrées en vigueur le 21 avril 2018 (D., art. 87, II, d).

Remarque : pour rappel, la déclaration du bénéficiaire effectif est obligatoire, pour les entités créées depuis le 1er août 2017, lors de l’immatriculation ou au plus tard dans un délai de 15 jours à compter de la délivrance du récépissé de dépôt de dossier de création d’entreprise (C. mon. fin., art. R. 561-55, al. 1er). Les entités créées antérieurement à cette date étaient, quant à elles, tenues d’effectuer cette déclaration au plus tard le 1er avril 2018.

Bénéficiaire effectif des sociétés non cotées

Le décret définit la notion de bénéficiaire effectif selon des critères de détention (capital ou droits de vote) ou de contrôle, en prévoyant une règle d’identification par défaut lorsque ces critères ne permettent pas de déterminer la personne physique bénéficiaire.

   Deux critères usuels : la détention (capital ou droits de vote) ou le contrôle de la société

Au sein d’une société, sont considérées comme bénéficiaires effectifs, la ou les personnes physiques qui (C. mon. fin., art. R. 561-1, al. 1er, mod.) :

-  détiennent, directement ou indirectement, plus de 25 % du capital ou des droits de vote de la société,

-  ou exercent, par tout autre moyen, un pouvoir de contrôle sur la société (C. com., art. L. 233-3, I, 3° et 4°) :

-  en déterminant en fait, par les droits de vote dont elles disposent, les décisions dans les assemblées générales de cette société,

-  ou, lorsqu’elles sont associées ou actionnaires de cette société, en disposant du pouvoir de nommer ou de révoquer la majorité des membres des organes d’administration, de direction ou de surveillance de cette société.

Remarque : la question se pose de savoir si la personne qui détermine les décisions collectives prises en dehors des assemblées générales (par exemple, les décisions résultant d’une consultation écrite ou d’un acte) doit être considérée comme bénéficiaire effectif.

   Un critère subsidiaire : le représentant légal de la société

L’apport majeur du décret réside dans la détermination du bénéficiaire effectif lorsqu’aucune personne physique n’a pu être identifiée selon les critères de détention (capital ou droits de vote) ou de contrôle et en l’absence de soupçon de blanchiment de capitaux ou de financement du terrorisme.

Dans ce cas, conformément au droit européen (Dir. (UE) 2015/849 du Parlement européen et du Conseil, 20 mai 2015, art. 3.6), le bénéficiaire effectif est le ou les représentants légaux ou, si la société n’est pas immatriculée en France, leur équivalent en droit étranger qui représente légalement la société.

 

Concrètement, il s’agit (C. mon. fin., art. R. 561-1, al. 2 à 6, mod.) :

-  du ou des gérants des sociétés en nom collectif, des sociétés en commandite simple, des sociétés à responsabilité limitée, des sociétés en commandite par actions et des sociétés civiles ;

-  du directeur général des sociétés anonymes à conseil d’administration ;

-  du directeur général unique ou du président du directoire des sociétés anonymes à directoire et conseil de surveillance ;

-  du président et, le cas échéant, du directeur général des sociétés par actions simplifiées.

Le décret précise que, lorsque les représentants légaux susmentionnés sont des personnes morales, le bénéficiaire effectif est la ou les personnes physiques qui représentent légalement ces personnes morales (C. mon. fin., art. R. 561-1, al. 7, mod.).

Remarque : en pratique, les sociétés déclaraient déjà, à défaut de bénéficiaire effectif identifié selon les critères de détention (capital ou droits de vote) et de contrôle, leur représentant légal, conformément aux exigences des greffes et aux recommandations de l’ANSA. Il convient de souligner que le décret ne lève pas les incertitudes sur certains cas particuliers tels que la détention du capital en démembrement de propriété, en copropriété indivise ou par un mineur. Sur ces points, on se reportera utilement à la fiche pratique publiée par le CNGTC, accessible sur le site www.infogreffe.fr.

Bénéficiaire effectif des placements collectifs

Comme pour les sociétés, le décret détermine le bénéficiaire effectif des placements collectifs selon des critères usuels et un critère subsidiaire.

   Deux critères usuels : la détention (capital ou droits de vote) ou le contrôle du placement collectif

Au sein d’un placement collectif, sont considérées comme bénéficiaires effectifs la ou les personnes physiques qui (C. mon. fin., art. R. 561-2, al. 1er, mod.) :

-  détiennent, directement ou indirectement, plus de 25 % des parts, des actions ou des droits de vote du placement collectif ;

-  ou exercent, par tout autre moyen, un pouvoir de contrôle au sens des 3° et 4° du I de l’article L. 233-3 du code de commerce (ci-dessus explicité pour les sociétés) sur le placement collectif ou, si ce dernier n’est pas une société, sur la société de gestion de ce placement collectif.

   Un critère subsidiaire : le représentant légal du placement collectif

Si aucune personne physique n’a pu être identifiée selon les critères usuels et en l’absence de soupçon de blanchiment de capitaux ou de financement du terrorisme, le bénéficiaire effectif est (C. mon. fin., art. R. 561-2, al. 2 à 4, mod.) :

-  si le placement collectif est une société, le ou les représentants légaux tels que définis par l’article R. 561-1 du code monétaire et financier (ci-dessus détaillé) ;

-  ou, si le placement collectif est une société gérée par une société de gestion ou si le placement collectif n’est pas une société, la ou les personnes physiques dirigeant la société de gestion au sens du 4° du II de l’article L. 532-9 du code monétaire et financier.

Bénéficiaire effectif des GIE et de certaines associations et fondations

Des entités juridiques autres que celles susmentionnées sont assujetties au régime de déclaration des bénéficiaires effectifs, dont notamment (C. mon. fin., art. L. 561-46, al. 1er et 2) :

-  les groupements d’intérêt économique ayant leur siège en France et jouissant de la personnalité morale conformément à l’article L. 251-4 du code de commerce ;

-  les associations à but non lucratif ayant émis des obligations ;

-  les fondations ayant émis un ou plusieurs emprunts obligataires.

Comme précédemment, le décret détermine le bénéficiaire effectif de ces entités selon des critères usuels et un critère subsidiaire.

Remarque : des dispositions spécifiques sont désormais prévues concernant la détermination du bénéficiaire effectif dans le cadre d’une fiducie ou de tout autre dispositif juridique comparable relevant d’un droit étranger, tel qu’un trust (C. mon. fin., art. R. 561-3-0, créé).

 

 

   Deux critères usuels : la détention du capital ou le contrôle de l’entité

Pour ces entités juridiques, sont considérées comme bénéficiaires effectifs les personnes physiques qui (C. mon. fin., art. R. 561-3, al. 1er à 5, mod.) :

-  sont titulaires, directement ou indirectement, de plus de 25 % du capital de la personne morale,

-  ou ont vocation, par l’effet d’un acte juridique les ayant désignées à cette fin, à devenir titulaires, directement ou indirectement, de plus de 25 % du capital de la personne morale,

-  ou disposent d’un pouvoir de nommer ou de révoquer la majorité des membres des organes d’administration, de gestion, de direction ou de surveillance de la personne morale,

-  ou exercent, par d’autres moyens, un pouvoir de contrôle sur les organes d’administration, de gestion, de direction ou de surveillance de la personne morale.

   Un critère subsidiaire : le représentant légal de l’entité

Là encore, le décret prévoit l’hypothèse dans laquelle aucune personne physique n’a pu être identifiée selon les critères usuels et en l’absence de soupçon de blanchiment de capitaux ou de financement du terrorisme.

Dans ce cas, le bénéficiaire effectif est la ou les personnes physiques qui représentent légalement la personne morale. Concrètement lorsque l’entité concernée est une association, une fondation ou un groupement d’intérêt économique, le bénéficiaire effectif est :

-  le ou les représentants légaux de l’association ;

-  le président, le directeur général ainsi que, le cas échéant, le ou les membres du directoire de la fondation ;

-  la ou les personnes physiques et, le cas échéant, le représentant permanent des personnes morales, désignées administrateurs du groupement d’intérêt économique.

Précisions relatives aux modalités déclaratives

   Dépôt par voie électronique

Le décret précise que le document relatif au bénéficiaire effectif peut être transmis par voie électronique et signé électroniquement via un procédé fiable d’identification garantissant le lien entre la signature et le document (C. com., art. R. 123-77, al. 2, mod.). Cette signature électronique simplifiée est possible pour le dépôt initial et pour les dépôts ultérieurs.

Cette disposition est issue d’une recommandation présentée par le Bureau du Conseil national des greffiers des tribunaux de commerce (CNGTC) auprès de la Direction générale du Trésor et de la Chancellerie afin d’écarter la signature électronique sécurisée, compte tenu de la quantité des formalités et de l’attachement de la profession à la digitalisation.

Remarque : pour plus de précisions sur le traitement des dépôts effectués par voie électronique, il convient de se reporter à la circulaire n° 25-2018 du CNGTC en date du 24 avril 2018.

   Dépôt du document actualisé des sociétés qui sont des placements collectifs

Tout fait ou acte nécessitant de rectifier ou de compléter les informations mentionnées dans la déclaration doit donner lieu, dans un délai de 30 jours, au dépôt d’un nouveau document (C. mon. fin., art. R. 561-55, al. 1er in fine).

Le décret instaure un délai dérogatoire pour les sociétés qui sont des placements collectifs. Désormais, lorsque la société est un placement collectif, cette obligation de déposer un document actualisé ne s’applique qu’à l’issue d’un délai de 180 jours ouvrés suivant la date d’immatriculation de la société au RCS (C. mon. fin., art. R. 561-55, al. 2, créé).

u         D. n° 2018-284, 18 avr. 2018 : JO, 20 avr.

 

Alexandra Pham-Ngoc,

Dictionnaire Permanent Droit des affaires

 

Éditions Législatives – www.elnet.fr

Article extrait du Bulletin d’actualité des greffiers des tribunaux de commerce n° 119, juin 2018 : www.cngtc.fr